mardi 9 décembre 2008

Réponses aux questions d'hier

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Réponses aux questions d’hier

1. Le Parti libéral du Québec sera-t-il majoritaire ou minoritaire?
Il est majoritaire. Jean Charest est donc parvenu à atteindre son objectif. Il a par ailleurs remporté un troisième mandat consécutif, ce qui ne s’était pas vu au Québec depuis Duplessis. Toutefois, il s’agit d’une courte majorité. Le parti libéral devra faire attention à tous ses députés et s’assurer qu’ils soient toujours présents en Chambre pour être certain de remporter tous ses votes. Quelques démissions par-ci, un Président de l’Assemblée par là, et le statut majoritaire du gouvernement pourrait être mis en péril. Toutefois, il est aussi possible que le parti libéral tente de voler des députés à l’ADQ, comme cela a été fait auparavant.

2. Combien de pourcentage de votes aura le parti québécois?

Grosse surprise ici, le parti québécois ayant obtenu 36% des votes. Le parti québécois a donc renversé la vapeur et la tendance lourde dont je parlais dans la note précédente. Ce score avantageux est étrange parce que les sondages ne le prédisaient pas et parce que le taux d’abstention a été très élevé. Habituellement, un tel taux pénalise le Parti Québécois. Certains analystes affirment que ce qui se déroule à Ottawa et la menace du gouvernement Charest majoritaire aurait fait gonfler le vote péquiste.
Cela dit, Mme Marois est bien en selle au PQ. Peu de gens pourront remettre en doute son leadership, maintenant qu’elle a ramené le PQ à l’opposition officielle, fait mentir les sondages et la chute péquiste qui durait depuis 15 ans, et fait entrer à l’Assemblée nationale une équipe forte (Bernard Drainville, Pierre Curzi, Scott Mackay, Lisette Lapointe, Louise Beaudoin, Marie Malavoy…et j’en oublie sûrement).

3. Combien de sièges aura l’ADQ?

L’ADQ a eu 7 sièges, dont plus que ce que la plupart des analystes prédisait. Je crois que c’est normal, car les adéquistes avaient maintenant l’avantage d’avoir des députés en place, qui avaient un bureau de comté et une équipe locale. Malgré tout, la chute fait mal. Suite à celle-ci, Mario Dumont a décidé de quitter son poste de chef de l’ADQ, coupant ainsi le suspense.

Je crois qu’il s’agit d’une bonne décision. L’ADQ, face au PQ et au PLQ, avait un problème. Son identité restait intimement liée à celle de Mario Dumont. Par conséquent, l’ADQ était à mi-chemin entre le parti et le véhicule d’un seul homme. Si la course à la chefferie de l’ADQ se déroule bien, le parti s’en trouvera grandi. On y verra de nouvelles personnes, de nouvelles têtes d’affiche, qui prendront la relève. L’ADQ commencera alors à avoir une existence indépendante de celle de son chef. L’ADQ pourra alors subit un processus d’institutionnalisation et devenir un parti à part entière.

4. De combien sera la distorsion électorale?

Pour mieux comprendre le propos, je vous invite à lire une note précédente : « Distorsion électorale lors des élections canadiennes de 2008 ».
La distorsion électorale totale est de 16,6%. On peut parvenir à ce calcul en comparant le pourcentage de votes reçus par les partis gagnants et le pourcentage de siège reçus par les partis gagnants. Voici le tableau comparatif.





En additionnant le pourcentage de distorsion des partis gagnants, on parvient donc à 16,6%. Profitons de l’occasion pour estimer quel aurait été le résultat dans une élection proportionnelle. Comme, dans une élection proportionnelle, les partis recueillant moins de 3% ne sont pas représentés, j’exclue ici le Parti Vert du calcul.



On voit donc assez clairement que les libéraux n’auraient pas été majoritaires sans leur bonne amie la distorsion électorale. Par ailleurs, les péquistes auraient 7 sièges de moins. Je voudrais par ailleurs souligner qu’hier soir, Mme Marois a cité René Lévesque et a dit qu’elle souhaitait suivre dans sa voie, celle de la démocratie. Je veux donc rappeler à Mme Marois que M. Lévesque était en faveur du scrutin proportionnel. Je l’invite donc à militer en faveur de celui-ci aussi, si elle veut vraiment s’inspirer de M. Lévesque. De plus, l’ADQ aurait un score beaucoup plus élevé, tout comme Québec Solidaire. En fait, dans un tel contexte, l’ADQ aurait la balance du pouvoir, alors qu’avec le mode de scrutin actuel, l’ADQ n’a même pas le statut de parti officiel.

Les graphiques illustrent clairement que le parti libéral de Jean Charest serait en fait minoritaire si nous avions adopté le mode de scrutin proportionnel.





5. Combien de pourcentage de votes récolteront les partis souverainistes marginaux?

Il m’est pour l’instant impossible de répondre convenablement à cette question, car les résultats officiels ne sont pas encore sur le site du directeur général des élections du Québec (DGEQ). Pour bien y répondre, il faudra patiemment compiler les résultats dans chacun des comtés. Toutefois, on sait déjà que Laurier-Dorion a été gagné par les libéraux car les souverainistes ont divisé leurs voix entre le PQ et QS (si, bien sûr, on accepte l’hypothèse selon laquelle les votes de l’un seraient nécessairement allés à l’autre en l’absence de l’autre, ce qui est discutable).
Néanmoins, on peut déjà regarder le résultat de ces petits partis au niveau national. Ce résultat est décevant. Le Parti république du Québec et le parti Indépendantiste ont tous les deux fait moins de 1%. Le vote total des partis souverainistes marginaux reste donc aux alentours de 4%. Ils ne sont toujours pas une grosse menace pour le PQ.

Après avoir épluché les pages de résultats de chacune des circonscriptions sur le site du DGEQ, on peut affirmer que seules 2 circonscriptions sont passées aux mains des fédéralistes, à cause de la division du vote souverainiste. Dubuc (9703 vs. 9272+708) et Laurier-Dorion (9769 vs. 7701+2963). Il s’agit donc d’un phénomène localisé, qui pourrait toutefois prendre de l’expansion, si le parti québécois n’y veille pas.

Deux bémols, toutefois. La recherche n’était pas excellente, car j’ai dû éplucher les pages une à une et effectuer des calculs mentaux, donc, possiblement erronés. Une meilleure recherche pourrait être effectuée à partir des bases de données qui seront disponibles plus tard. Second bémol : Il n’est aucunement certain que les votes se divisent ainsi. Peut-être que les partisans de QS auraient annulé leur vote ou se seraient abstenu, si QS n’avait pas été là. Il faut aussi prendre en compte ce facteur. Les partis ne sont pas interchangeables.

6. Combien de votes aura le Parti vert du Québec?

Le parti vert a eu moins de 2 pour cent des votes. Plusieurs questions se posent. En premier lieu, le nouveau chef du parti vert, Guy Rainville, est-il compétent? Ensuite, est-il toujours pertinent pour les verts de se distancer de Québec Solidaire, qui les a pris de vitesse lors de l’élection? Guy Rainville a tenté d’excuser la faible performance de son parti en affirmant que le parti n’avait que 88 candidats, et qu’il était donc normal qu’il ait un score moins élevé qu’en 2007. N’avoir que 88 candidats pour un parti qui s’insère dans une mouvance mondiale, quand l’environnement est une priorité, est un problème en soi. Ce n’est pas une explication valable pour justifier un piètre résultat, c’est un symptôme des problèmes du PVQ.

7. QS réussira-t-il à faire élire un ou deux porte-parole?

QS a réussi à faire élire l’un de ses deux porte-parole, Amir Khadir. QS devrait donc pouvoir mieux porter de l’avant son message qu’auparavant. Néanmoins, une question se pose : qu’adviendra-t-il de madame David, qui n’a pas réussi à se faire élire dans Gouin? Seul l’avenir nous le dira.

jeudi 4 décembre 2008

Réfutation des arguments conservateurs

Réfutation des arguments conservateurs

Je voudrais prendre un peu de temps, aujourd’hui, pour réfuter les arguments que les conservateurs avancent par rapport à la formation de la coalition. Alors, sans plus tarder :

L’argument démocratique

Les conservateurs ont avancé l’argument démocratique pour affirmer que leur gouvernement est légitime et que la coalition, elle, ne l’est pas. Avant de répondre à cet argument, il faut tout d’abord considérer que le débat peut se jouer sur deux scènes. L’une de ces scènes est la scène du suffrage démocratique, tandis que l’autre scène est celle de la loi électorale.

Au niveau du suffrage démocratique, on considère comme importants les votes des électeurs. Or, les conservateurs ont obtenu 37% des voix lors de l’élection du 14 octobre dernier. La coalition PLC-NPD, une fois ses votes combinés, a obtenu 44% des voix. Si on ajoute à cela les votes du Bloc, on arrive à 54%. Avec l’appui du parti vert, on arrive à 60% des voix. Quand des partis représentant 60% des Canadiens s’unissent pour une cause commune, on doit reconnaître qu’ils agissent avec l’appui de la population.

Au niveau de la loi électorale, on doit se rappeler comment fonctionne, dans les faits, la démocratie au Canada. Les conservateurs affirment que les Canadiens ont voté pour un gouvernement conservateur. C’est faux. Au Canada, on ne vote pas (du point de vue légal) pour un gouvernement, ni pour un parti. On vote pour un candidat. C’est pourquoi des gens qui quittent un parti pour en rejoindre un autre, en plein milieu d’une session parlementaire, ne perdent pas leur poste. Le gouvernement est formé de gens ayant la confiance du plus grand rassemblement de députés qui se mettent d’accord pour travailler ensembles au Parlement. À la base, après l’élection du 14 octobre, les conservateurs formaient par défaut ce rassemblement. Toutefois, aujourd’hui, ce rassemblement est formé des députés appartenant au parti libéral, au NPD et au Bloc québécois. Conséquemment, c’est de ce rassemblement que devrait être issu le prochain cabinet des ministres. C’est ainsi que fonctionne la démocratie canadienne.

L’argument de la stabilité

Stephen Harper essaie de faire peur aux Canadiens en leur disant que seul son gouvernement peut être stable, parce que la coalition ne tiendra pas. Le gouvernement de M. Harper est menacé de tomber aux Communes après deux semaines en Chambre; il n’est pas stable! Si le gouvernement minoritaire conservateur continuait à gouverner, alors il serait envisageable qu’il tombe à chaque vote de confiance. Ceci inclut les votes sur le budget et le discours du trône, ainsi que toutes mises à jour économiques, qui devraient être fréquentes en cette période de crise économique. Le gouvernement Harper serait donc constamment menacé de chute.

Au contraire, la coalition PLC-NPD est appuyée par le Bloc jusqu’en juin 2010. Ceci représente la durée de vie moyenne d’un gouvernement minoritaire. En d’autres mots, la coalition PLC-NPD est assurée de survivre au moins aussi longtemps que la moyenne des gouvernements minoritaires de l’histoire canadienne. Il est aussi envisageable qu’elle survive encore plus longtemps, si les choses vont bien.

Nous avons donc, comme options, le gouvernement conservateur, qui pourrait tomber n’importe quand, ou la coalition NPD-PLC, qui est au moins assurée de gouverner pour un an et demi. La stabilité semble reposer du côté de la coalition.

Crédibilité

Enfin, les conservateurs n’ont aucune crédibilité quand ils affirment qu’il est inacceptable que l’opposition forme le gouvernement : c’est ce qu’ils souhaitaient faire eux-mêmes avec l’appui du Bloc et du NPD en 2004, avant de faire tomber le gouvernement libéral de Paul Martin. Cette nouvelle information tache l’argumentaire de Stephen Harper. Que reproche-t-il aux partis d’opposition, au juste? De faire comme lui? On ne peut en 2004 lancer une entreprise, puis affirmer en 2008 que cette entreprise est anti-démocratique et inacceptable.

En conclusion

Les arguments avancés par les conservateurs ne tiennent pas la route. La coalition est démocratique, car elle a le support de 60% du suffrage universel et de 173 députés élus aux Communes. La coalition est plus stable que le gouvernement de Stephen Harper, puisque celle-ci est assurée de survivre jusqu’à l’été 2010. Enfin, le discours des conservateurs n’a aucune crédibilité, puisqu’ils reprochent aux partis d’opposition de faire exactement ce qu’ils faisaient eux-mêmes en 2004.

Si Stephen Harper et les conservateurs étaient responsables et démocrates, ils laisseraient la Chambre exprimer son opinion quant à la confiance qu’elle a en le gouvernement, et en assumeraient les conséquences, pour le bien du pays.